samedi 12 janvier 2008

L'autre plus beau métier du monde

Aujourd'hui est passé sur Canal+, lors de l'émission "+ Clair", un reportage sur les coulisses de la conférence de presse que Sarkozy a donné il y a quelques jours, notamment la préparation des quelques 600 journalistes qui peuplaient la salle des fêtes de l'Elysée. Il était assez difficile pour chacun d'eux de trouver LA place qui leur permettrait de poser une question, vous vous doutez bien que chacun n'a pas pu s'exprimer sinon la conférence ne serait pas encore terminée à l'heure qu'il est.

Après avoir passé en revue les tentatives multiples d'un journaliste de France 3 qui n'a pas pu en placer une, on arrive au clou du reportage, et là on se serait cru dans Matrix... Mais si, Matrix, vous vous rappelez ? Un monde dans le monde, avec une hiérarchie : ceux d'un monde savent ce qui se passe dans l'autre, mais pas l'inverse. Eh bien ici nos chers journalistes, des deux mondes, ont réussi à fusionner et se rejoindre en un seul point. J'explique :

Un parterre de journalistes assiste à une conférence de Sarko. Ca c'est le monde qu'on surveille. Le monde qui surveille tout ça est celui du reportage qui s'intéresse donc davantage aux journalistes. Bref on est entre journalistes, mais de deux mondes différents...

A ce stade de mon exposé je me permets de faire une petite parenthèse pour dire que finalement c'est surtout une question de standing : le journaliste qui n'aura pas l'occasion de se montrer lors de la conférence décide de prendre un peu de recul pour s'intéresser aux journalistes : il faut dire aussi que tout seul pour s'intéresser à 600 journalistes, c'est plus simple que 600 journalistes pour s'intéresser à Sarkozy. Fin de la parenthèse.

Revenons-en au clou de notre reportage, cette question magnifique posée par une journaliste de France24 (et vous allez vite comprendre pourquoi personne ne regarde cette chaîne), que le reportage qualifie de "LA question que tout le monde attendait". On devine que la journaliste va poser une question sur le pouvoir d'achat, sur la crise du logement, sur la hausse du prix du pétrole, sur le réchauffement climatique, sur la peur en l'avenir qui envahit nombre d'esprits, sur les délocalisations, sur les armes qu'on vend aujourd'hui à des pays qui nous en feront baver avec demain, sur le code du travail qui va terminer aux oubliettes. Bref, des sujets d'importance, ils ne manquent pas, des sujets pour lesquels LA question que tout le monde attend vaut la peine qu'on suive deux heures de conférence de presse. La question était la suivante :

"Monsieur le Président, allez vous vous marier avec Carla Bruni et quand ?"

Les bras m'en sont tombés.
Les spectateurs de TF1 qui sont tombés sur cette question ont du être très surpris : ils n'étaient pas au courant de cette idylle.

Et pour argumenter mon propos ci-dessus mentionnant la fusion des deux mondes, observateurs et observés, le reportage, qui poursuit dans la cour de l'Elysée après la conférence, consacre le plus gros de son temps au parcours après coup de la journaliste qui a posé LA question. Elle a notamment déclaré : "il faut arrêter d'être faux-cul et poser LA question, c'était pour moi un devoir de poser cette question la première".

S'il y a bien un seul domaine où Sarko peut être aussi faux-cul qu'il veut, c'est bien celui de sa relation avec Carla Bruni.
Hélas, ça ne s'arrête pas là.

La petite discussion qui suit était surréaliste : d'un côté donc la journaliste de F24 qui n'a rien trouvé d'autre comme sujet que le côté people du président dont tout le monde se fout hormis Voici et Gala, et de l'autre un des pontes du service politique de LCI. Déjà rien qu'avec le casting, on se dit qu'il y a un décalage quelque part : décalage social, et décalage intellectuel. Le type de LCI la félicite d'avoir posé cette question (quitte à ce que quelqu'un pose une question tarte, autant que ça soit par une gourde), et souligne que 95% des questions auxquelles Sarko a répondu étaient posées "par des bonnes femmes" (citation authentique). Ce à quoi la nana a répondu "La guerre des sexes ne fait que commencer"...

La guerre des cerveaux, elle, n'a même pas lieu d'être.

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