samedi 26 février 2011

Entre le marteau et l'enclume...

Marie, un petit bout de femme de 45 ans, travaille comme infirmière depuis toujours. Enfin, depuis qu'elle ne va plus à l'école, quoi.

Elle n'est pas à son compte, tout le monde n'a pas l'esprit d'entreprise et n'a pas forcément le cran qu'il faut pour voler de ses propres ailes et a besoin de se rattacher à une structure déjà existante, solide, qui la porte.

Rien de mal à cela.

Marie possède et vit une petite maison en Ardèche, à flanc de montagne, en pleine foret, donnant sur un petit bout de vallée qui offre un très joli paysage quand le temps est bien dégagé. De l'air pur, de l'eau tout droit sortie de la source juste derrière, peu d'ondes électromagnétiques (pas de wifi, et les portables ne passent pas), de quoi s'assurer une retraite calme avec le moins possible de pathologies à traîner.

Ses enfants ont grandi et sont partis de la maison, son mari est décédé l'année dernière, le deuil est fait, elle a repris du poil de la bête, tout se passe pour le mieux.

Dieu étant taquin, voici qu'arrive une épreuve. Une vache d'épreuve.

Marie est embauchée pour quelques mois dans ce que la société appelle pudiquement une "maison de retraite privée", qui n'est en fait qu'un lamentable et coûteux mouroir comme il en existe tant.

Que voulez-vous, les grabataires n'ont aucune valeur : ils ne travaillent plus, coûtent du fric à la sécu et en plus, ne sont plus capables de mettre un bulletin dans l'urne. Voilà le cynisme auquel on aboutit dans un monde d'élus qui font carrière dans l'élection.

Marie, petit bout de femme qui présente tous les signes d'une personne vertueuse à tous points de vue, se retrouve soudain à côtoyer l'impensable.

Revenons, à notre épreuve. L'impensable devient une réalité crue, insupportable.

Le genre d'impensable qu'on lit dans les journaux, qui fait parfois la une d'un JT pour bien nous expliquer avec la plus grande hypocrisie à quel point nous, les "non-élus", ne prenons pas soin de nos aînés.

Alors nous, on perçoit ça avec un certain détachement parce que bon, ça arrive aux autres. C'est pas en bossant dans un garage automobile qu'on tombera sur des situations comme ça. On sait que ça existe, mais comme c'est lointain, on en a pas vraiment la notion.

L'impensable en question, c'est la maltraitance, une maltraitance des plus abjectes, des plus inhumaines, des plus humiliantes qu'il puisse être donné de voir : des petits vieux laissés plusieurs jours baigner dans leur urine s'ils se sont oubliés au lit, d'autres à qui on fait manger leur vomi s'ils ont rendu après le repas, de la nudité forcée le temps que les vêtements soient lavés, vols d'effets personnels et d'argent, vraiment des choses absolument ignobles.

Marie n'a pu supporter de voir comment cela fonctionnait dans cet établissement pourtant réputé, cher, qui présente de l'extérieur tous les signes d'une maison respectable et respectueuse.
Après en avoir parlé à sa direction qui l'a joyeusement envoyé paître, elle décide d'en parler à l'agence régionale de santé, qui prend l'affaire en main. Tout se passe alors très vite : les enquêtes sanitaires sont suivies de poursuites pénales.

Il y a procès, et les sanctions tombent.

TOUTES les sanctions.

Le directrice de l'établissement, parfaitement au courant de ces agissements, mais qui fait partie de ses fondateurs, a été condamnée à ne plus assurer de responsabilités dans le monde hospitalier.... Mais voilà, en tant que fondatrice et détentrice d'une majorité de parts, elle est en fait toujours aux commandes. En arrière-plan, certes, mais aux commandes quand même. Autant dire rien du tout.

Deux autres personnes ont été condamnées, et c'est vraiment là que je veux en venir :

L'infirmière qui travaillait en binôme avec Marie, qui était tout aussi écoeurée de ces pratiques, mais s'écrasait parce qu'elle avait peur des conséquences, a par contre été condamnée à de la prison avec sursis pour ne pas avoir dénoncé cela aux autorités alors qu'elle y travaillait depuis bien plus longtemps.

La dernière sanction n'est pas pénale : dans le petit monde des hôpitaux et hospices, tout se sait très vite et désormais, Marie ne peux plus prétendre travailler dans aucun établissement d'Ardèche, ni même des départements voisins. Elle est grillée.

A présent, elle ne peut plus que passer les dimanches dans sa belle maison ardéchoise, qui s'abime à vue d'oeil puisque presque inhabitée, le reste du temps elle loue un appartement minable à Grenoble qui lui coûte une fortune par mois, pour pouvoir continuer à exercer son métier d'infirmière, à plus de 150 kilomètres de chez elle.

Que conclure de cette histoire ? Deux choses :

Premièrement, les acteurs du monde hospitalier, à partir d'un certain niveau, se protègent entre eux. Pire encore, ils savent tous que dans leur établissement, peuvent survenir des pratiques malsaines et au lieu de lutter contre cela, ou même faire de la prévention, c'est à dire faire en sorte que ces comportements ne jaillissent pas, préfèrent maintenir une omerta absolument nauséabonde. Quiconque met en évidence des dérives est mis au placard. Donc, on privilégie la poursuite des dérives à leur arrêt.

Deuxièmement : si on dénonce, on est grillé professionnellement. Si on ne dénonce pas, on risque la prison. Il semble que notre système judiciaire, si prompt à toujours tout vouloir légiférer, jusqu'aux dimensions de nos carrés de PQ et autant détails techniques ridicules, soit incapable de répondre à des questions de société, terriblement humaines pour le coup, en punissant la lâcheté plutôt que la responsabilité, et en encourageant pas..... le courage.

Marie, un petit bout de femme de 45 ans, prise entre le marteau et l'enclume, qui a fait le bon choix, a quand même pris le coup et s'est faite écraser.

samedi 8 janvier 2011

Codex Medicamentus

Personne ne trouve curieuse l'avalanche de nouvelles qui pointent du doigt la qualité des médicaments qui nous sont proposés (j'irai jusqu'à dire "imposés" car ça ne vient à l'idée à personne de contester ce qu'un médecin écrit sur une ordonnance : on fait confiance.... jusqu'où ?) alors que cela fait maintenant des années et des années que beaucoup de spécialistes (je parle des vrais, ceux qui savent et veulent faire savoir, pas ceux qui passent sur les plateaux de télévision et qui nous diffusent ce qu'on appelle la "pensée" unique qui veut que le monde pharmaceutique oeuvre pour le bien de l'humanité alors que c'est un ramassis de vautours cupides) nous en parlent déjà sans trouver le moindre écho ailleurs que sur l'internet où ils ne touchent qu'une poignée d'initiés, ou au moins ceux qui s'informent différemment ? D'abord le Mediator, maintenant un vaccin contre la rougeole ?

Le fait de choisir d'en parler massivement a évidemment un but, mais lequel ? Celui qui consiste à dire à la population qu'il y a de moins en moins de médicaments efficaces et que par conséquent rembourser systématiquement n'a plus de sens ?

Je rappelle que ça fait un moment que beaucoup commencent à dire "après le dynamitage des retraites, c'est la sécu la suivante sur la liste". Une bonne campagne sur la mauvaise qualité des médicaments est idéale quand on souhaite trouver un prétexte pour en rembourser le moins possible.

Attention, qu'on ne se méprenne pas sur mes propos : je ne dis pas qu'il ne faut pas que la mauvaise qualité des médicaments, dûe à une médecine de plus en plus chimique, ne soit pas connue du grand public, je dis juste que le fait d'en parler massivement comme ça tout d'un coup, est étrange et cela n'est évidemment pas un hasard (de toute façon, il n'existe JAMAIS de hasard).

Je rappelle que l'OMS, et après elle l'Union Européenne est sur le point de proposer que soit interdite la médecine par les plantes, donc la médécine naturelle : imposer une médecine chimique. Un complément idéal au Codex Alimentarius qui nous prépare aussi un avenir radieux en matière de nourriture pourrie.

Ca vous paraît impossible ? Eh bien cela arrange ceux qui veulent imposer cela, pour leur plus grand profit et pour notre plus grand malheur : vous avez pas fini de vous ruiner en soins VOLONTAIREMENT inefficaces, et de moins en moins remboursés.

En effet, ceux qui sont motivés pathologiquement par l'argent adorent les paradoxes : d'un côté imposer des marchandises (les effets toxiques du Mediator sont connus depuis longtemps, ça n'a jamais empêché les labos d'en faire la promotion auprès des médecins, jamais empêché ces derniers de le prescrire, et jamais empêché les pharmaciens de le vendre : tout ce petit monde serait-il incompétent ? Je ne crois pas, non), et de l'autre, matraquer une info sur leur mauvaise qualité afin de justifier leur déremboursement, car je rappelle aussi qu'un médicament remboursé voit son prix réglementé, et forcément cela ne plaît pas à ceux qui les mettent sur le marché : ils aimeraient bien les vendre plus cher. Un médicament déremboursé peut être vendu à n'importe quel prix, surtout si la concurrence est faible.

Je le rappelle encore une fois : plus la liste de médicaments sur une ordonnance est longue, plus elle est suspecte : n'hésitez pas à en parler avec votre médecin, voire demandez-lui de justifier cette liste : il doit savoir pourquoi il vous prescrit tel ou tel médicament, et s'il y a plus de médicaments pour calmer les effets secondaires, que de médicaments supposés vous soigner, ou encore s'il vous répond avec dédain un truc du genre "je connais mon métier", vous pouvez être sûr que son métier, c'est le commerce avant la médecine. Le geste qui sauve dans ce cas, changer de médecin, vous ne vous en porterez que mieux.

J'ai une petite anecdote sur le sujet : alors que je me rendais chez un client pour son PC en panne, le PC en question étant dans une pharmacie, j'attendais qu'il finisse de servir une cliente avant de l'aborder (il m'avait déjà remarqué et fait signe qu'il était à moi une fois la cliente partie). La cliente en question était une femme d'un âge assez avancé, à qui le pharmacien servait une quantité impressionnante de boîtes en tous genres. Une fois cela terminé, la dame est repartie avec 2 sacs plastiques pleins à craquer. Vraiment pleins. Il fut un temps où j'étais à peine au SMIC, et où mes courses de la semaine tenaient dans moins de place que ça. La dame a eu à payer un peu moins de 10 Euro. Par curiosité, j'ai demandé ensuite au pharmacien, une fois qu'on était seuls "il y en avait pour combien vraiment là-dedans ?". Je ne demandais pas de montant précis, évidemment, mais il m'a répondu "une petite fortune". Quoi qu'il en soit, je ne sais pas en combien de temps cette dame s'envoie ça dans le cornet, mais ça m'a vraiment effrayé : en volume, elle doit avaler plus de médicaments que de nourriture au cours de sa journée et il m'est difficile de croire que cette accumulation de produits chimiques dans son organisme n'a que de bons effets sur sa santé. Et croyez-moi, il n'y avait pas que des vitamines dans son sac : des noms de médicaments plus compliqués les uns que les autres, à donner le tournis.

Pour le côté "vautours", je raconterais bien l'anecdote sur un client qui bossait pour un labo pharmaceutique (que je ne nommerai pas pour ne pas faire de publicité à UPSA) et qui a fait l'objet d'un harcèlement absolument horrible de la part de sa hiérarchie, avec chantage et dénonciation à la clé auprès des autorités sanitaire (pour une raison bien débile en regard de ce qu'il a subi, ce qui appuie encore le côté cynique), et qui m'a raconté ça un jour que j'étais chez lui et que son PC était en train de se réinstaller : à ces moments-là, on a rien à faire sinon poireauter que ça finisse, ça laisse le temps de discuter, on apprend des trucs hallucinants sur la vie de gens de tous horizons. Mais cela est une autre histoire et serait un peu trop long (ahem...)

Bref, cette vague d'infos mérite qu'on s'y intéresse de près et surtout les effets que cela aura sur la sécu, d'un part par son contenu, mais aussi et surtout pour la raison de sa venue soudaine et massive, car elle n'est pas anodine et le fait qu'elle tombe maintenant n'est absolument pas innocent : les journalistes étant des incapables dans le domaine, la source de l'info, ce n'est pas eux, mais ça vient d'ailleurs.

Le secret des sources aidant, on ne peut que supposer : soit ils se sont soudain mis à lire (et à comprendre, ce qui serait déjà un peu plus étonnant) la revue "Prescrire", une véritable mine d'or sur le monde de la médecine et de la pharmacie, soit ils font comme d'habitude : du copier/coller de dépêche AFP et de dossier de presse de ministère, encore plus incompétent en la matière (un petit coucou à Roselyne), mais qui obéit à une ligne gouvernementale qui, petit à petit, détruit tout ce qu'on a gagné au fil de batailles sociales principalement durant le 20ème siècle, et surtout qui est champion dans l'art de la communication. Et dans une campagne de comm', quand on veut faire passer une idée supposée répondre à un besoin, la première étape est de créer le besoin. Dire que de plus en plus de médicaments sont inefficaces voire dangereux peut créer un besoin dans l'inconscient : celui de ne plus creuser le trou de la sécu en les remboursant (car ne croyez pas qu'une fois déremboursés, ils ne seront plus proposés, quand on en sort un par la porte, il revient par la fenêtre, il suffit de changer le nom et de faire approuver le nouveau, par les mêmes experts qui ont approuvé le premier sans rien y trouver à redire).

J'arrête là, y'a déjà largement de quoi digérer tout ça.

jeudi 16 décembre 2010

Vidéo répression du jour

On m'a fait parvenir cette cochonnerie par mail :



Je livre mon avis sur la chose :

Joli joujou.

Cela dit, ce qui est surtout intéressant dans cette vidéo, c'est pas la forme (la présentation du gadget), mais le fond (la machine politique, communication et répression qu'il y a derrière).

Tout particulièrement, j'adore le mot "enquête" en haut de l'écran, foutage de gueule intégral, laissant supposer que c'est TF1 qui est allé frapper à la porte des flics.

La ficelle est un peu grosse : c'est le ministère de l'intérieur qui a convoqué toutes les chaînes pour présenter son nouveau joujou, à l'attention de la population, dans une vidéo qui a le mot "MENACE" écrit en bien gros sur l'écran, le genre de truc sur lequel TF1 répond toujours le premier "présent".

Au passage, TF1 était aussi le premier à faire un super reportage pour montrer à quel point le Taser, c'était génial et que ça allait permettre en toute sécurité pour tout le monde (bien sûr, 10000V dans le corps, ça picote juste, c'est tout) de mettre fin à la dangereuse délinquance de nos banlieues, responsable de tous les maux de la société c'est bien connu, surtout de papy de la cambrousse qui n'a pas un HLM à 80 bornes à la ronde.

'faut pas s'en faire, les autres chaînes vont aussi bientôt diffuser leur petit "reportage" sur le sujet. Les chaînes de la TNT surtout, qui surfent à mort sur le "on a suivi les flics qui traquent les délinquants" (le terme délinquant étant évidemment très flexible) vont faire leur travail de sape du moral, et ces chaînes font encore plus fort que TF1 et M6 réunies, du grand art.

Et le tout sur fond d'automatisation de la répression, car c'est évidemment de cela qu'il s'agit.

Le lobby de la lutte contre la délinquance routière a encore fait du beau boulot.

Après tout, les équipements de Robocop qu'on trouve dans les voitures (structures déformables, airbags partout, ABS, suspensions actives, ESP, etc...) ne sont pour rien dans la chute des victimes de la route, ça aussi c'est bien connu, c'est uniquement les radars et les PV qui vont avec. Ben tiens, laissez tout l'arsenal répressif et remettez-nous de la bonne vieille caisse sans tout ce bazar, avec un châssis en béton armé, freinage classique, aucun airbag, suspension à ressort tout bête, et vous allez voir si le nombre de victimes va pas remonter en flèche.

J'attends le premier radar français qui flashe en zone de travaux rabaissée à 40km/h pour l'occasion, le tout sur autoroute (déjà vu en Angleterre, devenu en une semaine le radar le plus rentable de tout le pays : personne ne peut supporter de rouler à 40km/h sur une autoroute).

Au passage, les commissaires européens réfléchissent déjà à imposer la géolocalisation sur les voitures (j'en parlais déjà autour de moi l'année dernière, je voyais ça arriver dans les 5-10 ans, en fait j'étais optimiste), l'arme ultime pour mettre des prunes pour excès de vitesse sans avoir à investir quoi que ce soit. Ah si, un abonnement GPRS va avec. Et tu seras obligé de le prendre, condition sine qua non pour être assuré. Les chinois payent la balle qui les exécute, on est plus soft, mais on se rapproche : tu payes l'abonnement qui va servir à t'allumer.

Est également suggérée la caméra intérieure embarquée, nous dit-on "pour aider à reconstituer les accidents et tenter de mettre fin à l'escroquerie à l'assurance". Comme disait le grand philosophe Demolition Man : "Et pourquoi pas une laisse dans le cul ?". Et tout ça pour notre bien, évidemment.

Cela dit, je prédis un calme sur le sujet d'ici quelques mois. En effet, avec la fin de la prime à la casse, le marché automobile va encore se prendre une claque, et lorsqu'il s'agit de relancer les ventes automobiles, non seulement on sponsorise à tout va (le constructeur, et l'acheteur), mais cela correspond aussi à des périodes où les campagnes sur la sécurité routière sont les plus calmes. Ben oui, 'faut faire chier les automobilistes, mais pas trop pour pas les dégoûter.

Je terminerai par cette phrase de Benjamin Franklin : "Si vous acceptez d'abandonner une partie de votre liberté pour un peu de sécurité, vous ne méritez (ndRafo : et n'aurez au final) ni l'une, ni l'autre".

Bref, je conclus : cette vidéo est à l'attention de la population et est clairement à identifier comme une MENACE, au sens juridique du terme : "je te menace de ceci si tu fais cela". Plus clairement, "Voilà ce qui va vous arriver si vous vous tenez pas à carreau".

PS : pour le coup de la géolocalisation et la caméra dans la bagnole, on m'a déjà rétroqué "ils ont pas le droit". Qu'on arrête de sortir ce genre d'ânerie car je rappelle que le droit, c'est, dans le désordre, 2 votes à l'assemblée, 1 vote au sénat et 1 décret d'application. C'est ça, le droit. Un droit qui n'existe pas aujourd'hui, si on veut, sous quelques semaines il est là et il est applicable.

J'ai encore plein de raisons de râler mais ça sera pour d'autres posts.

mercredi 2 décembre 2009

Je râle...

Je râle parce qu'il est 2h du matin, que je suis déjà réveillé et je pète le feu donc ça va être long à lire.

Alors je râle aussi parce que beaucoup ont l'air de s'imaginer que s'ils écrivent n'importe comment, c'est pas grave, on s'en fout (ou plutôt ILS s'en foutent) puisqu'eux-mêmes se comprennent.

Alors là, OBJECTION !!

L'écriture, comme la parole, est un moyen de transférer sa pensée aux autres, plus qu'à soi-même.

Si on parle n'importe comment, on ne transfère pas la bonne pensée (voire on en transmet pas du tout) et on est mal ou pas compris. Parallèlement à cela, on comprend aussi mal les autres. Et surtout, c'est très pénible pour ceux qui écoutent.

C'est pareil quand on écrit n'importe comment.

Et surtout, ça cache un problème bien plus profond : ça veut dire que ceux qui écrivent de façon quasi phonétique ont besoin de prononcer les mots qu'ils lisent pour les comprendre puisqu'ici c'est le son qui compte et pas l'écriture. Le temps perdu quand il s'agit de lire quelque chose doit être invraisemblable. Je les imagine bien tentant de lire un roman de 800 pages... ou même 100.

En général, ceux qui ne savent pas écrire correctement ne savent pas non plus lire correctement. Pour s'en rendre compte très rapidement, il suffit de faire passer quelques tests simples :
  1. Montrez sur un écran une longue liste de mots (environ un millier). Cette liste doit être classée par ordre alphabétique mais ne le précisez pas, ils doivent normalement s'en rendre compte d'eux-mêmes. Demandez de trouver le plus vite possible 4 mots qui en font partie, piochés au hasard. En général, ceux qui ne savent pas écrire correctement et pas lire non plus mettront un temps fou pour trouver les mots, passeront plusieurs fois dessus avant de les trouver ou encore ne les trouveront pas du tout. Les plus gravement atteints ne s'apercevront même pas que la liste est alphabétique.

  2. Arrivez-vous à lire cette phrase ?

    "Sleon une édtue de l'Uvinertisé de Cmabridge, l'odrre des ltteers dnas un mot n'a pas d'ipmrotncae, la suele coshe ipmrotnate est que la pmeirere et la dreneire soeint à la bnnoe pclae. Le rsete peut êrte dnas un dsérorde ttoal et vuos puoevz tujoruos lrie snas porlbème. C'est prace que le creaveu hmauin ne lit pas chuaqe ltetre elle-mmêe, mias le mot cmome un tuot."

    Celui qui bute sur les mots a de très grosses difficultés à formuler des mots et/où à les décoder car il ne sait pas distinguer un mot lorsqu'il est écrit de façon incorrecte MAIS QUI RESTE SENSÉE. Savoir écrire correctement, c'est aussi savoir corriger les erreurs.

    En effet, dans la phrase citée ci-dessus, si les mots ont leurs lettres dans le désordre, ces lettres sont quand même les bonnes. Si on ajoute des fautes d'orthographe à l'inversion des lettres, là ça devient beaucoup plus compliqué. Encore faut-il connaître soi-même les bonnes lettres qui doivent formuler le mot.

    Je fais également la distinction entre la faute d'orthographe et la faute de frappe. Je peux vous citer l'exemple d'un collègue qui vient me demander ce que veut dire le mot "omportant", sans même s'être rendu compte que ce mot n'existe pas, que c'est une coquille et que le mot correct dans la phrase était "important".

    Tenez,
    un autre exemple de coquille.

  3. Choisissez quelques mots assez compliqués et peu usités (des termes médicaux par exemple), épelez-les normalement, ni trop vite, ni trop lentement et demandez à la personne en face de vous de reconstituer le mot. Plus la personne se retrouve handicapée dans sa manipulation de l'écrit, plus cela lui prendra de temps, et il est fort probable qu'elle ait besoin d'écrire ce qu'on lui épelle alors que la reconstitution doit se faire mentalement. L'inverse marche aussi : si vous demandez à quelqu'un d'épeler une phrase, c'est rapidement la catastrophe, non seulement parce que ça sera bourré de fautes, mais en plus parce que la personne ne voit pas les mots comme des ensembles de lettres ou de syllabes.

Bref, quelqu'un qui écrit n'importe comment échoue en général assez lamentablement à ces tests et dans beaucoup de métiers où la communication, notamment écrite, est importante, c'est tout simplement éliminatoire.

Pour celui qui est coffreur sur des chantiers de BTP, ce n'est pas bien grave évidemment, mais inutile d'espérer un jour évoluer vers un poste à responsabilités où il s'agit de rédiger des rapports d'activité pour ses supérieurs par exemple, ou plus haut encore, lire les rapports de ses subordonnés afin d'en dégager une synthèse cohérente. Et là, il ne s'agit nullement de discrimination, c'est celui qui n'a pas bien appris qui se discrimine lui-même et se condamne à des postes subalternes sans aucune possibilité d'évolution, aussi minime soit-elle.

On peut aussi parler des métiers de la communication où il faut rédiger des documents à valeur contractuelle, ou même des métiers juridiques : une faute de frappe sur un document du greffier, ça fait un mot à la place d'un autre, le correcteur automatique de Word ne voit rien (puisque le nouveau mot fait aussi partie du dictionnaire et la phrase garde un sens, il faut arrêter de faire confiance à ce truc) et c'est un violeur récidiviste qui est libéré. L'histoire est authentique et remonte à quelques mois.

Enfin, j'ai entendu il y a quelques semaines l'intervention radio d'un professeur d'université qui expliquait qu'une proportion de plus en plus grande d'élèves qui y entrent n'ont pas les bases de la lecture/écriture et qu'ils (les profs) sont obligés de mettre en place des cours de mise à niveau. Les élèves sont majeurs, se pointent à l'université sans être capables de lire/écrire/prendre des notes correctement et c'est l'université qui s'occupe de leur apprendre la syntaxe, la grammaire, l'orthographe alors que cela s'acquiert dès l'école primaire (en somme, c'est trop tard). Ceux-là, ils sont mal partis, vraiment et je ne les vois pas passer le cap de la première année, ni même du premier trimestre. Et je ne parle pas des profs en collège ou lycée qui s'arrachent les cheveux à corriger des copies indéchiffrables. A propos, fait-on toujours des dictées dans les écoles primaires et les collèges ? J'ai entendu un parent d'élève il y a quelques années me dire que non, ça ne se faisait plus. Si c'est toujours le cas, ça explique bien des choses.

Conclusion : si vous avez des gosses, suivez attentivement leur apprentissage de la lecture et de l'écriture, c'est vital pour leur avenir.

Deux anecdotes qui me viennent en tête, là tout de suite :
  • Le fameux "mer il et fou" tapez ça sur google, le thread sur gamekult est ULTIME ! Rien que la première page, c'est fabuleux. Il a même eu droit depuis à son site dédié "meriletfou.com", truffé d'images clin d'oeil et très drôles.
  • Lu hier sur un bon de dépot SAV d'une imprimante, dont le client a reçu un exemplaire qui a valeur contractuelle : "claper cassez"